Le printemps ouvrait peu à peu les fleurs dans les jardins du fort.L'air était agréablement frais,loin des écrasantes châleurs d'août,et les dernières gouttelettes d'une averse passagère telle un songe avait laissé le ciel bleu comme jamais,les rayons du soleil diffusant des nuances d'opales à travers quelques nuages éparses,blanc comme du coton.C'était à l'heure de l'après-midi qui vous pousse irrésistiblement à la paresse,ou tout simplement à regarder l'océan sans plus penser à rien,empli d'un vide de calme et de paix bien rare.
James souriait.Il ne savait trop pourquoi,mais il se sentait bien,tout semblait parfait.Semblait.Bah,après tout,le beau temps coulait en longues cascades de lumière droite et crue par les fenêtres du couloir qu'il empruntait,sa carrière allait plus que bien,quoi demander de plus ? Rien que cette journée avait un petit quelque chose d'unique : premier jour de repos depuis....Une éternité! Entre le rassemblement de tous les hommes valides de Port Royal et des environs afin de grossir les troupes venues d'Angleterre et les secrétaires de la EITC qui travaillaient d'arrache-peid pour terminer au plus vite leurs rapports et leurs comptes-rendus,Norrington n'avait plus vraiment grand chose à faire.L'anglais marchait dans le fort,tel un promeneur habitué des lieux.Il avançait sans vraiment réfléchir au chemin qu'il suivait et ses pas finir pas le guider jusqu'à la Grande Salle du fort,pièce luxueuse réservée aux soirées mondaines et aux réceptions destinées aux ambassadeurs.Parmis les tentures venues d'Inde,le chandelier de cristal,la table de chêne précieux et les sofas de soie,se notait la présence d'un petit clavecin,disposé en reclus au fond de ce petit cosmos de luxure tranchant avec la froideur des pierres qui composaient les murs du bâtiment.
L'Amiral,distraitement,laissa sa main droite courir sur les touches,jouant les premières notes de "God Save the Queen".Sa modeste prestation lui arracha un sourire : il pouvait faire mieux,bien mieux...Mais il n'était pas là pour s'amuser ! Mais bon,il n'y avait personne,le silence régnait alentour...James se mordit la lèvre et céda à la Tentation qui lui murmurait de continuer à jouer.Prenant place sur le petit tabouret rouge qui accompagnait l'instrument et,remontant légèrement ses manches,entama timidement la première partie d'un morceau fort triste,certainement un Requiem.Et plus James avançait dans sa partition mentale,plus il prenait de l'assurance et,se croyant totalement seul,s'adonna à un de ses plaisirs inavoués : la musique classique...